num 'istmo' acossado.
Quand,
au mois de février, le président tunisien a vitupéré contre des «hordes de
migrants clandestins» venues de l’intérieur de l’afrique pour «changer la
composition démographique» de son pays, il s’est érigé en démagogue en chef
d’une abréaction identitaire en Tunisie. Kaïs Saïed a repris à son compte la
propagande du Parti nationaliste tunisien (PNT), qui ne compte aucun élu, pas
même au niveau municipal, et ne réunit en fait qu’une poignée d’activistes. Cette
cellule agit-prop prétend qu’il y aurait 700 000 subsahariens en Tunisie alors
qu’il n’y en a, tout au plus, que 70 000 dans un pays de 13 millions
d’habitants, soit à peine plus d’un demi-pourcent de la population.
Le
PNT agite aussi le spectre d’une «nouvelle Palestine», c’est-à-dire d’une autre
terre arabe occupée, cette fois en Afrique du Nord, à la suite d’un «plan de
colonisation» ourdi et financé par l’occident. Celui-ci chercherait de nouveau
à «installer» - tawteen, en arabe, un terme chargé de la peur de perdre son
chez soi - des indésirables au sud de la Méditerranée.
Que le président d’un pays puisse
faire sienne une telle variante du «grand remplacement» est un problème en soi.
Kaïs Saïed s’est fourvoyé dans un cul-de-sac politique: élu avec 73 % des
suffrages en 2019, il s’est arrogé les pleins pouvoirs en juillet 2021 et
gouverne depuis par décrets présidentiels. Chaque jour un peu plus, il serre la
vis d’une répression obsidionale. Avec lui, l’espoir de démocratisation du
monde arabe se meurt en Tunisie, là où il avait vu le jour il y a douze ans.